Guide pour limiter les risques dans le sevrage aux médicaments psychiatriques II

Introduction

« Nous vivons dans un monde qui, lorsqu’il s’agit de psychotropes, devient assez fou. »

D’une part il y a la “guerre contre les drogues”, qui déclare illégaux certains psychotropes, remplit nos prisons, et n’a pas mis fin à la consommation de drogue. Ensuite, il y a les psychotropes acceptables comme l’alcool et le tabac, dont on fait la publicité partout avec des promesses de bonheur et de succès bien qu’ils causent une dépendance généralisée, des maladies, et la mort. Les psychotropes prescrits légalement comme les stimulants, les analgésiques, et les anxiolytiques sont tout aussi addictifs et dangereux que la drogue qu’on peut trouver dans la rue, mais ils ont l’approbation d’un médecin. Et puis il y a les neuroleptiques, le lithium, et les antiépileptiques, qui ont des effets indésirables et dangereux mais qui aident à maîtriser et calmer l’état psychique des gens lorsqu’ils se sentent incontrôlables, et alors on les appelle des “antipsychotiques” et des “stabilisateurs d’humeur”.

Quand il s’agit de psychotropes, les vies sont souvent en jeu, que ce soit à cause d’une addiction, des effets indésirables des médicaments, ou des risques liés aux crises émotionnelles et à la folie. Si l’on combine cela aux messages confus envoyés par la société au sujet des psychotropes, il en résulte beaucoup de peur. Les psychotropes deviennent anges ou démons. Il faut en prendre à tout prix, ou les arrêter à tout prix. Nous ne voyons que les risques, ou bien nous sommes trop effrayé(e)s pour voir le moindre risque. Il n’y a pas de compromis: c’est noir ou blanc, tout ou rien.

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Il est facile de tomber dans la pensée absolutiste lorsqu’il s’agit de médicaments psychotropes. Les pro-médicaments se focalisent sur les risques des psychoses et des états émotionnels extrêmes, alors que les antimédicaments se focalisent sur les risques de la consommation de médicaments. Mais l’esprit de ce guide et la philosophie de travail du Freedom Center et de l’Icarus Project pour l’auto-détermination face au traitement, est d’envisager la pensée du tout-ou-rien au sujet des psychotropes comme une grande part du problème.

Réduction des effets nocifs en santé mentale

Les approches absolutistes vis à vis de la drogue et de l’éducation sexuelle apprennent à être abstinent, à “simplement dire non”, et c’est pareil pour tout le monde. Elles fonctionnent pour certaines personnes, mais pas pour la majorité, et celles/ceux qui ne suivent pas le modèle finissent par être jugé(e)s, et non aidé(e)s.

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“La réduction des effets nocifs” est différente : elle est pragmatique, pas dogmatique. La réduction des effets nocifs est un mouvement international d’éducation sanitaire communautaire qui reconnaît qu’il n’existe pas de remède unique valable pour tout le monde, pas de standard universel de “succès” ou “d’échec”. Se débarrasser du problème n’est pas nécessairement la seule solution. La réduction des effets nocifs préfère accepter les personnes là où elles en sont et les éduquer à faire des choix éclairés et des compromis calculés qui diminuent les risques et augmentent le bien-être. Les gens ont besoin d’information, de choix, de ressources et de soutien pour pouvoir avancer vers une vie plus saine, à leur propre rythme et selon leur propres termes.
Appliquer la philosophie de réduction des effets nocifs à la santé mentale est une approche nouvelle mais qui se développe. Cela signifie ne pas toujours vouloir éliminer les “symptômes” ou interrompre tous les traitements. Cela implique de reconnaître que les gens prennent déjà des médicaments psychotropes, sont déjà en train d’essayer d’arrêter, et vivent déjà avec des symptômes, et que, dans cette réalité complexe, les gens ont besoin d’aide réelle, et non de jugement. Cette philosophie encourage à peser les différents risques impliqués: les effets nocifs des états extrêmes, aussi bien que les effets nocifs des traitements, tels que les effets indésirables des médicaments, les étiquettes invalidantes, et les hospitalisations traumatisantes.

Prendre des décisions basées sur la réduction des effets nocifs signifie analyser honnêtement tous les côtés de l’équation : l’aide que peuvent apporter les médicaments lorsqu’une vie semble hors contrôle, à quel point ces mêmes médicaments peuvent être risqués, et les différents choix et alternatives. Toutes les décisions impliquent un processus d’expérimentation et d’apprentissage, y compris un apprentissage à partir de ses erreurs et un changement d’objectifs en cours de route. La réduction des effets nocifs accepte tout cela, car elle considère que l’essence de n’importe quelle vie saine est dans la capacité à renforcer son autonomie.


Nous sommes tous différents

Il n’existe pas de formule pour décrocher des médicaments psychotropes. Ce qui existe, et ce que ce guide présente, ce sont des expériences communes, des recherches fondamentales, et des informations importantes qui peuvent potentiellement rendre le processus moins difficile. Beaucoup de gens parviennent à arrêter de prendre des médicaments psychotropes, avec ou sans accompagnement, alors que d’autres trouvent cela très dur. Beaucoup continuent de prendre des médocs parce que les bénéfices sont supérieurs aux inconvénients. Mais beaucoup de gens finissent par continuer de prendre leur traitement sans jamais explorer d’autres possibilités, simplement parce qu’ils ne connaissent pas d’autres moyens.

Quand nous avons compté uniquement sur les médecins, la télévision, et les sources d’information traditionnelles, il peut nous sembler impossible de faire face à nos états émotionnels extrêmes sans médicaments. Peut-être n’avons-nous jamais entendu parler de quiconque ayant traversé ce que nous traversons sans médicaments. Peut-être une ordonnance a amené pour la première fois les autres à prendre au sérieux notre besoin d’aide, et que les médicaments semblent la seule façon de reconnaître la gravité de problèmes incontrôlables. Et quand tout le monde autour de nous en est venu à considérer les médicaments comme essentiels à notre survie, explorer une nouvelle voie peut sembler trop risqué.

Beaucoup d’entre nous se sentent aidés par les médocs, mais ils n’en comprennent peut-être pas vraiment le fonctionnement, ou ne connaissent pas d’autres possibilités. Certain(e)s d’entre nous n’ont jamais trouvé les médicaments utiles, ou bien les médicaments ont même aggravé nos problèmes et nous sommes prêt(e)s à essayer de vivre sans eux.

Les gens sont parfois déchirés entre le risque de continuer et celui d’arrêter les médocs, ou bien ils prennent de multiples médicaments et doutent qu’ils soient tous utiles. D’autres peuvent vouloir décrocher, mais ils attendent le bon moment, ou alors ils ont déjà essayé par le passé, ils ont connu un retour de symptômes effrayants, et décidé d’en reprendre pour le moment.

Nos chemins vers la guérison sont uniques. Certains d’entre nous n’ont besoin de faire aucun grand changement dans leur vie, laissant le temps et la patience faire leur travail. D’autres devront probablement faire des transformations importantes en ce qui concerne la nutrition, le travail, la vie de famille, ou les relations personnelles ; peut-être aurons-nous besoin de prendre davantage soin de nous-même, de nous concentrer sur l’art et la créativité, d’adopter d’autres approches comme le soutien par les pairs, la thérapie, l’herboristerie, l’acupuncture, ou l’homéopathie, ou encore de trouver d’autres centres d’intérêts comme étudier ou se rapprocher de la nature. Nous découvrirons peut-être que le premier pas est de bien dormir ; nous aurons éventuellement besoin d’être un peu plus structuré ; ou peut-être aurons-nous besoin d’arrêter toute drogue ou alcool. Il est possible que nos priorités soient de trouver un logement ou un nouveau travail, ou que nous ayons besoin d’établir un réseau solide de soutien ou d’ami(e)s de confiance ; et il peut être important d’oser parler avec plus d’honnêteté et de vulnérabilité de ce que nous traversons.

Le processus pourrait sembler mystérieux et arbitraire, et face à cela, une attitude d’accueil et de patience est essentielle.

Parce que chacun de nous est unique, c’est comme si nous naviguions dans un labyrinthe, perdant notre chemin et le retrouvant, traçant notre propre carte à mesure que l’on avance.

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Regard critique sur les “troubles mentaux” et la psychiatrie

Les psychiatres mettent les gens sous traitement en raisons d’expériences humaines étiquetées “troubles mentaux” : détresse émotionnelle extrême, souffrance accablante, changements brusques d’humeur, croyances inhabituelles, comportements gênants, et mystérieux états de folie. Actuellement des millions de personnes dans le monde, y compris des enfants et des personnes âgées, prennent des médicaments psychotropes quand ils/elles sont diagnostiqué(e)s avec un trouble bipolaire, une schizophrénie, une dépression, de l’anxiété, un déficit de l’attention, une obsession compulsive ou un stress post-traumatique. Les chiffres augmentent chaque jour.

Pour beaucoup de personnes, les médicaments psychotropes sont très utiles. Mettre un frein à une vie hors de contrôle,être capable de travailler, d’étudier, d’avoir des relations personnelles, de s’endormir, et de tempérer des émotions extrêmes peut sembler vital. La sensation de soulagement est parfois spectaculaire, et les médicaments peuvent susciter des émotions très puissantes, et même un sentiment de salut. Mais l’aide que les médicaments psychotropes offrent à de nombreuses personnes peut laisser peu de place et de visibilité aux expériences faites par d’autres qui considèrent ces médicaments comme néfastes, blessants et mettant même leur vie en péril. En conséquence, il est rare de trouver dans la société une compréhension claire de comment et pourquoi ces médicaments fonctionnent, ou une discussion honnête sur les risques, les alternatives, et la manière de les arrêter si les gens le souhaitent.

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Les médecins et les publicités à la télévision racontent aux gens que les médicaments psychotropes sont nécessaires en cas de maladie biologique, tout comme l’insuline est nécessaire en cas de diabète. Ils promeuvent l’idée que les médicaments corrigent des déséquilibres chimiques et traitent des anormalités du cerveau. Cependant, la vérité est autre : “biologie” et “déséquilibres chimiques” sont devenus des simplifications accrocheuses pour convaincre les gens de mettre leur espoir dans les médecins et les solutions rapides. Ces termes manquent de clarté et sont en réalité bien plus complexes. Les facteurs biologiques (comme la nutrition, le repos et les allergies alimentaires) affectent tout ce dont nous faisons l’expérience, mais parler de “causes” ou de “fondements biologiques” installe la croyance que les médicaments seraient la clé de nos problèmes. Dire que quelque chose a une cause ou un fondement biologique peut répandre l’idée que la solution doit toujours être médicale, et que le “traitement” doit inclure des médicaments psychotropes. Une fois que les gens reçoivent un diagnostic et commencent à prendre un traitement, il est facile de percevoir les médicaments comme physiquement nécessaires à la survie.

Il n’existe pas de données scientifiques solides qui permettent de considérer les troubles mentaux comme de simples dysfonctionnements biologiques “corrigeables” par les médicaments. De plus, de nombreuses personnes diagnostiquées même de la plus sévère bipolarité ou schizophrénie parviennent à se rétablir complètement sans médicaments. Les expériences qui sont étiquetées comme des troubles mentaux ne sont pas “incurables” et ne durent pas toujours “à vie” : elles sont plus mystérieuses et imprévisibles. Pour certaines personnes, les médicaments psychotropes sont des outils pratiques qui modifient leur état de conscience de façon utile, mais ce ne sont pas des traitements nécessaires pour soigner une maladie.

Une fois que vous reconnaissez cela, davantage de possibilités deviennent envisageables. Par ailleurs, les risques potentiels des médicaments psychotropes sont alors examinés de plus près, et ils sont très sérieux – maladies chroniques, déficience mentale, dépendance, aggravation des symptômes psychiatriques, et même risque de décès précoce.
Les médicaments psychotropes représentent un marché multimilliardaire, tout comme le pétrole ou les dépenses militaires, et les entreprises possèdent la motivation et les moyens de dissimuler des faits concernant leurs produits.


Si l’on regarde plus attentivement la recherche et que l’on examine les revendications du système de santé mentale de plus près, on découvre une réalité bien différente de celle que “l’industrie des pilules” et de nombreux médecins nous amènent à croire. Les entreprises pharmaceutiques suppriment des évaluations précises sur les risques des médicaments, induisent en erreur les patients quant à l’importance des controverses autour des théories du trouble mental, promeuvent une compréhension erronée du fonctionnement des médicaments psychotropes, empêchent le financement et la publication de recherches sur des approches alternatives, et masquent le rôle du traumatisme et de l’oppression dans la souffrance mentale. Pour une grande partie du système de santé mentale, une seule chose est valable pour tout le monde, sans prendre en considération le coût humain : les scandales vont grandissant, et la fraude et la corruption qui entourent certains médicaments psychotropes atteignent les proportions de l’industrie du tabac.

Dans cet environnement culturel complexe, les gens sont à la recherche d’une information précise sur les risques et avantages possibles afin de pouvoir prendre leurs propres décisions. Trop souvent, les personnes qui ont besoin d’aide pour diminuer et arrêter ces traitements ne reçoivent aucun soutien ou conseil. Parfois le désir d’arrêter les médicaments est perçu en lui-même comme le signe d’une maladie mentale – et d’un besoin de plus de médicaments.

Lorsque nous discutons des “risques” et des “dangers”, il est important de comprendre que toute vie comporte des risques : chacun(e) d’entre nous fait le choix tous les jours de prendre des risques acceptables, comme conduire une voiture, faire un métier stressant, ou boire de l’alcool.

Il est probablement impossible de prédire exactement comment ces risques vont nous affecter, ou de les éviter entièrement, mais il est important de les connaître autant que possible. Examiner les risques des traitements signifie également examiner les risques des souffrances émotionnelles/”psychoses” en eux-mêmes, et ainsi prendre la meilleure décision vous concernant. Peut-être les médicaments psychotropes sont-ils la meilleure option compte tenu des circonstances et de la situation qui sont les tiennes, ou peut-être devrais-tu essayer de les réduire ou de les arrêter. Ce guide n’a pas pour but de vous influencer dans un sens ou dans l’autre, mais de vous aider à prendre connaissance des choix qui s’offrent à vous si vous décidez de tenter l’arrêt des médicaments.

En raison de l’influence des pro-médicaments, il existe très peu de recherches sur le sevrage des médicaments psychotropes. Pour réaliser ce guide, nous nous sommes basés sur les meilleures informations disponibles, y compris d’excellentes sources provenant du Royaume-Uni, et nous avons travaillé avec les conseils d’un groupe de professionnel(le)s de santé (voir plus loin) comprenant des médecins psychiatres, infirmières, et praticiens alternatifs, qui ont tous une expérience clinique dans l’aide aux personnes désirant arrêter leur traitement médicamenteux. Nous nous sommes également appuyé(e)s sur la sagesse collective d’un réseau international de pairs, d’allié(e)s, de collègues, d’activistes et de guérisseurs qui sont en lien avec le Freedom Center et The Icarus Project, comme avec des sites internet tels que Beyond Meds. Nous vous encourageons à utiliser ce guide non comme une source définitive, mais comme un point de départ à vos propres recherches et apprentissages. Et nous espérons que vous partagerez ce que vous aurez appris avec d’autres et contribuerez à de prochaines éditions.


Déclaration universelle des droits et libertés mentales

1. Tous les êtres humains sont différents. Chaque être humains a le droit d’être mentalement libre et indépendant.

2. Chaque être humain a le droit de tout sentir, voir, entendre, comprendre, imaginer, croire ou expérimenter, de quelque manière et à quelque moment que ce soit.

3. Chaque être humain a le droit de se comporter de quelque façon que ce soit qui ne nuise pas aux autres ou ne viole pas des lois justes et équitables.

4. Aucun être humain ne sera soumis sans son consentement à une incarcération, une restriction, une punition, ou une intervention médicale ou psychologique dans le but de réprimer, contrôler ou altérer ses pensées, ses sentiments ou ses expériences.


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